
Année :
2025
Thématique :
Endocrinologie
Retard pubertaire chez la fille
K. Fouatih, A. S. Lambert,
Service d’endocrinologie pédiatrique, CHU Bicêtre, AP-HP, Le Kremlin Bicêtre, France

Conduite diagnostique devant un retard pubertaire chez la fille (arbre 2)
(1) Les antécédents doivent être détaillés : la taille et l’âge de la puberté chez les parents (âge des premières règles de la mère) et la fratrie. L’analyse de la courbe de croissance staturo-pondérale est indispensable. Les antécédents pathologiques et les traitements reçus (corticothérapie, chimiothérapie, radiothérapie, etc.) sont soigneusement notés. Sont recherchés à l’interrogatoire des troubles digestifs, une polyuro-polydipsie, des céphalées et une anomalie du champ visuel.
L’examen clinique doit rechercher les signes évoquant une pathologie acquise, une dysmorphie. L’examen des organes génitaux externes, des seins et de la pilosité pubienne permettra de quantifier soit l’absence totale, soit un début passé inaperçu, ou encore l’arrêt de la puberté. Enfin, la présence d’une anosmie (incapacité à sentir les odeurs) permet d’évoquer, sur la seule clinique, le diagnostic rare d’hypogonadisme hypogonadotrope par syndrome de Kallmann de Morsier.
Le bilan initial comporte un bilan de base à la recherche d’une pathologie générale et/ou inflammatoire (rénale, hépatique, systémique). La détermination de l’âge osseux permet d’obtenir un repère quantifiable de la maturation du squelette par les stéroïdes sexuels. Il est lu à l’aide d’un atlas radiologique (Greulich et Pyle), à partir d’une radiographie du poignet et de la main gauche. Le début de la puberté
correspond habituellement à un âge osseux de 11 ans chez la fille (apparition du sésamoïde du pouce).
(2) En première intention, les dosages plasmatiques de FSH et LH de base, sont l’étape initiale essentielle du diagnostic étiologique.
(3) Des valeurs normales ou basses de gonadotrophines (FSH et LH) sont en faveur d’une origine
hypothalamo-hypophysaire (hypogonadisme hypogonadotrope).
(4) Une IRM hypothalamo-hypophysaire est indispensable devant tout hypogonadisme hypogonadotrope afin d’éliminer une pathologie congénitale (malformation hypophysaire, anomalie de la ligne médiane, agénésie des bulbes olfactifs) ou acquise (tumorale ou infectieuse).
(5) Le retard pubertaire simple est plus rare chez la fille. Une histoire familiale de retard pubertaire associé à un ralentissement précoce de la croissance et un examen clinique et biologique normal sont le plus souvent retrouvés. Il reste un diagnostic d’élimination.
(6) Toute pathologie chronique sévère peut être responsable d’un retard pubertaire (mucoviscidose, cardiopathie, maladie cœliaque, insuffisance rénale). La recherche d’une activité physique intensive et/ou une problématique nutritionnelle est indispensable. L’hypogonadisme hypogonadotrope (FSH et LH basses) est dit fonctionnel et est alors réversible avec l’amélioration de la symptomatologie causale. Il peut être également secondaire à une endocrinopathie ou une iatrogénie.
(7) L’hypogonadisme hypogonadotrope permanent peut quant à lui être congénital (déficit gonadotrope avec ou sans anosmie) ou acquis (tumeur hypophysaire, iatrogénie ou cause infectieuse).
(8) Des valeurs élevées de FSH et LH témoignent de l’origine gonadique du retard pubertaire. L’impubérisme contraste avec des valeurs élevées de FSH et LH.
Les hypogonadismes hypergonadotropes représentent 25% des cas de retard pubertaire chez la fille. Des valeurs basses d’inhibine B et d’AMH confirment insuffisance gonadique.
(9) Un caryotype est réalisé devant tout hypogonadisme hypergonadotrope en l’absence d’antécédents pouvant expliquer une pathologie gonadique, qu’il existe ou non une dysmorphie évocatrice d’un syndrome de Turner. Rappelons que toute fille dont la taille est < – 2 DS, présentant un retard pubertaire ou des gonadotrophines élevées, doit avoir un caryotype.
(10) En cas de caryotype normal, en l’absence d’antécédent évocateur (torsion d’annexe notamment),
une insuffisance ovarienne prématurée d’origine auto-immune, génétique ou iatrogène sera à recher-
cher.
(11) L’échographie pelvienne témoigne du défaut d’imprégnation oestrogénique déjà cliniquement visible par l’absence développement mammaire : la hauteur utérine est prépubère et inférieure à mm, le col utérin est plus développé que le corps, les ovaires sont de petite taille. En cas de normalité du dosage des gonadotrophines avec un développement mammaire initié (cas du retard de ménarche), l’échographie recherchera l’existence d’une malformation utérine ou vaginale.
Conclusion
Le retard pubertaire chez les garçons est l'un des motifs les plus courants de consultation en endocrinologie pédiatrique. En l’absence de cause identifiée, le retard pubertaire est présumé simple.
Le retard pubertaire chez la fille est un motif plus rare de recours et une démarche diagnostique rigoureuse est indispensable pour rechercher une cause à ce retard.
Un diagnostic et une prise en charge tardifs peuvent avoir des répercussions négatives sur croissance, la minéralisation osseuse, le bien-être psychologique et la fertilité.
Mots clés
retard pubertaire, hypogonadisme hypogonadotrope, hypogonadisme hypergonadotrope
Bibliographie - Références
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